Confidence : Je ne suis pas en rétablissement. Je suis en rétablissement. À la fin de mon adolescence, je buvais occasionnellement de manière excessive. Nous ne connaissions pas les conséquences possibles de cette façon de boire, particulièrement à cet âge. Cela faisait partie de la culture de mon groupe et en ce qui me concerne, je n’ai pas bu ainsi trop longtemps et cela ne s’est jamais développé en d’autres choses. J’ai eu de la chance. Je n’ai pas eu de séquelles identifiables de ce comportement.

En 2010, Sarah A. Benton a écrit un article dans Psychology Today qui contenait le paragraphe suivant décrivant le « rétablissement » :

« Un alcoolique qui est « en rétablissement » est essentiellement en rémission de l’alcoolisme. Son alcoolisme n’est pas guéri, mais il est maintenu à distance d’une manière qui lui permet de ne pas avoir d’envies intenses de boire ou d’obsession mentale et il a réglé ses problèmes sous-jacents (santé mentale, spirituelle, physique) qui ont mené ou causé son problème d’alcool. Ces alcooliques ont trouvé un moyen pour combler le vide qui l’était auparavant avec l’alcool à l’aide de solutions spirituelle, émotionnelle ou comportementale qu’ils ont apprises grâce à un traitement, à une thérapie, à de la gestion de médicaments ou à des groupes d’entraide mutuelle (A.A., SMART Recovery). Ils ont effectué des changements majeurs qui leur ont permis de trouver la sérénité en éliminant l’alcool de leur vie et d’atteindre un équilibre émotionnel. »

L’auteure avance plusieurs hypothèses dans cet article avec lesquelles je suis en désaccord, ce qui pourrait faire l’objet d’un autre blogue, mais là n’est pas la question. Je crois que plusieurs personnes sont d’accord avec sa description du rétablissement. Elle suit d’ailleurs de près la définition utilisée dans les programmes de 12 étapes, telle que je la comprends.

L’organisme Substance Abuse and Mental Health Services Administration (SAMHSA) aux États-Unis offre une définition différente, mais avec plusieurs recoupements. Sa définition pratique du rétablissement, qui date de 2011, est la suivante :

« Le rétablissement est un processus de changement durant lequel des individus s’efforcent d’améliorer leur santé et leur mieux-être, et de vivre une vie enrichissante dans la communauté de leur choix en tentant de réaliser leur plein potentiel. »

Je ne veux rien enlever au parcours incroyable de ceux qui ont trop consommé d’alcool ou de drogues dans leur vie, mais qui se sont repris en main et ont rempli leur vie de sens, de communauté et de décisions positives pour leur santé et leur bien-être. Mais ma question est la suivante : la plupart d’entre nous, cliniciens œuvrant dans le domaine de la santé mentale, évitent d’utiliser des termes diagnostics pour nous définir nous-mêmes ou nos clients, car nous voulons faire la distinction entre la personne et son diagnostic. Le terme « rétablissement » sert-il bien une population déjà stigmatisée par d’anciens comportements? Pourquoi ne pourrions-nous pas (et eux) les accueillir dans un pan plus large de la société qui a choisi de vivre pleinement et de s’épanouir? Les descriptions que fait Martin Seligman du véritable bonheur ou de l’épanouissement semblent similaires (vous pouvez lire davantage à ce sujet ici).

Ceux qui sont en rétablissement sont-ils condamnés à faire partie d’un sous-groupe de notre société à cause de décisions passées concernant l’abus de substance et se faire accoler un diagnostic d’« alcoolique »? Comparez-les à d’autres gens qui ont subi d’autres types de traumatismes, qui ont appris à ignorer leurs sentiments et à se conformer aux normes sociales qui font la promotion du matérialisme, de l’hypersexualisation, etc., à ceux qui n’ont pas appris comment composer avec l’anxiété, la douleur, etc., à ceux qui, à un certain moment, semblent trouver de nouvelles façons de composer différemment et de réintégrer la société sans y associer le nom de rétablissement? Sont-ils vraiment si différents?  Et si oui, quels avantages tirent-ils en se distinguant? Ces groupes de personnes me ressemblent beaucoup. Je ne suis pas certaine, et je le dis très humblement (et je suis ouverte aux discussions et aux désaccords), que de s’accrocher au passé pour définir le futur rend vraiment service à ces âmes courageuses.

Qu’est qu’une démarche de rétablissement si ce n’est une démarche d’épanouissement pour une certaine population?